Principes de base de prévention (articles R4541-3 et 4 du CT):
Critères d’évaluation des risques:
La norme NF X 35-109 permet de calculer des niveaux de risque par rapport à la manipulation manuelle de charges. En présence de facteurs de risques supplémentaires, la norme précise des coefficients permettant de calculer les seuils correspondant aux 4 niveaux de risques dans les conditions réelles de travail.
En conditions standard, ces niveaux de risque sont :
Définition des conditions standard pour le transport manuel de charges :
Les particularités individuelles, telles que le sexe, la taille, l’âge, le degré d’entrainement physique ou la formation aux techniques de manutention de charges interviennent en ligne de compte : une femme de 1,60 m, avec un faible niveau d’entrainement physique et sans formation particulière n’encourt pas le même risque physique qu’un homme de 1,85 m, entraîné, formé et expérimenté.
Les postes de travail doivent être adaptés selon les caractéristiques des populations y travaillant.
A titre informatif, voici les limites de port de charges précisées dans le Code du travail selon le sexe et l’âge du travailleur (art. D.4153-39)
14 ou 15 ans | 16 ou 17 ans | 18 ans et plus | |
Sexe féminin | 8 kg | 10 kg | 25 kg |
Sexe masculin | 15 kg | 25 kg | 55 kg (ou 105 kg si autorisation du médecin du travail) |
La limitation du port de charges au seuil légal fixé à 55 kg ou encore la possibilité d’une autorisation médicale individuelle pour porter plus de 55 kg sont des pratiques dangereuses et obsolètes pour la prévention. A ce niveau de sollicitation physique les risques pour la santé sont très importants, même en absence de manifestations physiques immédiates. Dans tous les cas, des modifications chroniques ont lieu au niveau des structures sollicitées au cours du temps, ce qui se traduit en une usure physique en fin de carrière.
De plus, le travail n’est jamais comme l’haltérophilie, un geste standardisé, dans des conditions parfaites. Il faut tenir compte des éléments de majoration du risque, mentionnés ci-dessus, pour diminuer les poids des charges à manipuler, afin d’éviter aussi bien les accidents, que l’usure du corps et l’apparition de maladies professionnelles.
Les seuils précisés par le Code du travail s’avèrent pourtant très utiles pour les travailleurs mineurs.
Sur ce sujet: « L’emploi du mineur ne peut être autorisé que pour des travaux qui n’entraînent, eu égard à l’âge de l’intéressé, aucune fatigue anormale, tant à raison de la nature des tâches à accomplir qu’à raison des conditions dans lesquelles elles doivent être accomplies.
Il est notamment interdit d’employer l’intéressé à des travaux répétitifs ou accomplis dans une ambiance ou à un rythme leur conférant une pénibilité caractérisée. » (Article D4153-4)
Les travailleurs vieillissants ont leurs particularités également, dont il faut tenir compte : moindre capacité d’effort, diminution des performances physiques (force musculaire, souplesse, vitesse etc.), ou encore cumul de pathologies chroniques plus ou moins manifestes.
Conception ergonomique de l’environnement et des postes de travail
Organisation ergonomique de l’activité
Utiliser des aides techniques en remplacement de l’effort manuel à chaque fois que possible
Information et formation des salariés sur les risques de l’activité et les moyens de prévention efficaces (techniques, organisationnels et individuels):
Préparation physique à la réalisation du travail
Les travailleurs doivent recevoir une formation adéquate à la sécurité relative à l’exécution des opérations de manutention manuelle de charges. Au cours de cette formation, essentiellement à caractère pratique, les travailleurs sont informés sur les gestes, postures et modes opératoires à adopter pour accomplir en sécurité les manutentions manuelles (articles R4541-8 et R4141-13 du Code du travail).
Ces articles du Code du travail sont appliqués à la lettre et des formations « gestes et postures » sont régulièrement délivrés aux salariés. Ces enseignements de techniques s’avèrent souvent impossible d’appliquer en pratique, en raison des variabilités du travail ou du rythme à suivre, au point que ce genre de formations n’a pas d’efficacité réelle pour réduire les accidents du travail ou encore moins pour prévenir l’apparition des troubles musculo-squelettiques.
La formation PRAP
Pour plus d’efficacité, l’INRS a développé la formation PRAP (Prévention des Risques liés à l’Activité Physique), qui se décline en 2 filières de formation spécifiques en fonction du secteur d’activité : secteur industrie, bâtiment et commerce (2 jours) et secteur sanitaire et social (3 jours).
Objectifs de la formation PRAP :
La formation PRAP doit être proposée à tout le personnel concerné par les manutentions manuelles de charges. Elle peut entrer dans le cadre de la formation continue.
La formation participative en manutention manuelle
La formation participative en manutention manuelle proposée par l’IRSST (équivalent de l’INRS au Québec) est un autre exemple remarquable de formation en vue de l’acquisition d’un vrai savoir-faire, en partant des observations sur le terrain des pratiques des manutentionnaires expérimentés.
Voici les huit règles qui encadrent l’action en manutention selon cet enseignement :
La colonne vertébrale est conçue et adaptée pour travailler de façon alignée. Fait référence aux postures les plus adéquates pour le dos au moment de l’effort. Il faut à la fois respecter les courbures naturelles du dos, sans être trop penché vers l’avant, et travailler de façon symétrique.
L’éloignement de la charge multiplie l’effort. À l’effort déjà considérable du bas du dos pour soutenir le poids du corps, s’ajoute la charge qui représente un poids d’autant plus élevé qu’elle sera éloignée de la personne qui la tient. Il est donc préférable de tenir toute charge le plus près possible de soi.
Moins on a la charge longtemps dans les mains, plus on s’économise. La phase où on supporte complètement la charge est la plus exigeante : il faut tenter de la réduire au minimum.
Il est possible de faire « travailler la charge pour soi ». Grâce à sa position dans l’espace ou via ses propriétés intrinsèques, il est souhaitable de travailler AVEC la charge, plutôt que de travailler CONTRE elle.
Être en équilibre et prêt à réagir, pour éviter les mauvaises surprises. L’ajout d’une charge externe au corps influence la qualité de l’équilibre, tout comme les surfaces sur lesquelles on se déplace. Avoir à récupérer d’un déséquilibre et/ou à réagir à un imprévu implique des efforts soudains et brusques qui sont dommageables : il faut éviter ces efforts inutiles et nuisibles.
Le corps peut contribuer à réduire l’effort. Il est possible de mettre le corps au service des gestes que requiert la manutention. L’utilisation du corps passe d’abord par la contribution des membres inférieurs, qui réalisent la majorité des efforts.
Il faut choisir la manière de parcourir l’espace entre la prise et le dépôt. Le trajet ou parcours choisi pour passer de la prise au dépôt influence particulièrement la durée de maintien de la charge. Il faut choisir la transition appropriée.
Le « pattern » ou motif rythmique et la qualité du mouvement. Le jeu de la vitesse et la fluidité des mouvements effectués influencent les contraintes au dos et la durée de maintien de la charge. Il faut savoir choisir le rythme qui convient et éviter les mouvements par à-coups, saccadés.
Chaussures de sécurité (adaptées au risque):
Gants de manutention adaptés – s’adressent au risque de blessure au niveau des mains
Note : La ceinture lombaire n’est pas un équipement de protection individuelle et ne doit pas être portée par une personne saine à titre préventif des lombalgies et de manière systématique. La ceinture lombaire est un outil thérapeutique dont l’intérêt dans chaque cas doit être discuté avec le médecin traitant et le médecin du travail.
Le résultat de l’évaluation des risques liés aux manutentions manuelles de charges doit être retranscris dans le Document unique.
Ce document doit comprendre une identification des sources de danger associée à une analyse des conditions de travail réel, en prenant en compte les facteurs humains, techniques et organisationnels et des éléments tels que le rythme de travail et les aléas de l’activité, la variabilité des conditions d’intervention, etc. La finalité de ce document n’est nullement de justifier l’existence des risques, mais de mettre en œuvre des mesures effectives, visant à l’élimination des risques.
L’association des travailleurs à cette analyse des risques est indispensable, en raison de leur connaissance des situations de travail réel et des risques associés. Cela permet de mieux appréhender les contraintes subies par les travailleurs et les marges de manœuvre dont ceux-ci disposent, dans l’exercice de leur activité.
L’employeur doit établir et mettre à jour périodiquement pour chaque salarié concerné une fiche individuelle (art. L4121-3-1) qui va tracer l’exposition à des travaux de manutention manuelle de charges considérés comme des facteurs de pénibilité au travail.
La fiche doit ainsi mentionner (art. D4121-6) :
Facteurs biomécaniques de risque:
Rôle des facteurs psychosociaux
Le stress psychologique engendré par des facteurs psychosociaux d’origine professionnelle intervient dans le développement des troubles musculo-squelettiques, aussi bien dans leur apparition (augmentation du niveau de tension musculaire, dysfonctionnement des fibres musculaires), que dans leur évolution (baisse du niveau de tolérance à la douleur, aggravation des symptômes, absentéisme ou présentéisme, demande de reconnaissance en maladie professionnelle).
Facteurs psychosociaux d’origine professionnelle: charge de travail trop importante ou trop monotone, manque d’autonomie dans le travail et de marge de manœuvre pour faire face aux contraintes, absence de soutien hiérarchique et social, relations tendues, sentiment d’insécurité par rapport à l’avenir professionnel etc.
Troubles musculo-squelettiques
La manutention manuelle de charges est un risque professionnel très présent, responsable de problèmes de santé divers, aigus ou chroniques, qualifiables en accidents du travail, maladies professionnelles (tableaux 57, 79 et 98), maladies à caractère professionnel et usure prématurée de l’organisme (traces durables identifiables et irréversibles sur la santé, selon la définition de la pénibilité au travail à l’art. L4121-3-1 du Code du travail).
Accidents du travail possibles: lumbagos, entorses, déchirures musculaires, contusions, chutes ou glissades, etc., la liste est longue.
Troubles musculo-squelettiques : tendinites ou tenosynovites (poignet, coude, épaule), atteinte des nerfs périphériques (exemple : syndrome du canal carpien), lombalgie chronique, hernie discale lombaire, lésions chroniques du ménisque etc.
En cas de lombalgie sans éléments de gravité, le maintien au travail ou la reprise rapide du travail sur un poste adapté à l’état du salarié et conforme aux principes ergonomiques est un facteur positif pour éviter le passage à la chronicité.
Pour plus d’informations, voir la brochure « Travail et lombalgie » éditée par l’INRS (référence ED 6087).
Page créée le 14/10/2012.