L’effet nocebo est bien documenté en médecine, en relation avec les traitements médicamenteux ou autres procédures médicales et consiste dans l’apparition d’effets secondaires non-spécifiques par mécanisme psychosomatique.
Ces effets sont corrélés avec les attentes du patient des effets secondaires du traitement, le processus de conditionnement par lequel le patient apprend des expériences antérieures à associer la prise de médicament avec des effets somatiques, certains traits psychologiques tels que l’anxiété, la dépression et la tendance à la somatisation, d’autres facteurs situationnels ou contextuels.
On a vu l’effet nocebo en action lors de l’épidémie mondiale de grippe A H1N1 et de la campagne de vaccinations menée à cette occasion et les médias ont bien eu une contribution significative.
Le domaine de la santé au travail n’est certainement pas épargné par cet effet.
Il est impliqué dans les cas de souffrance au travail où l’appréhension de l’agression psychique perçue de la part de l’organisation du travail ou des difficultés à faire face aux contraintes professionnelles représente un facteur majeur d’aggravation de l’état mental, de diminution des ressources personnels de résistance au stress et finalement d’incapacité de travail.
L’effet nocebo est probablement le mécanisme responsable de l’apparition des « syndromes collectifs inexplicables » (voir le guide INVS sur ce sujet) où des symptômes non-spécifiques sont accusés par une population de travailleurs exposés à des nuisances professionnelles méconnues et mal-définies, sans que l’on puisse identifier un mécanisme d’action ou un lien de causalité entre l’exposition et les symptômes. Ces syndromes peuvent prendre la forme du « syndrome du batiment malsain » ou du « syndrome d’hypersensibilité aux champs électromagnétiques ».
Cet effet représente un territoire d’intervention pour le médecin du travail assez peu exploré jusqu’à maintenant. Le médecin peut essayer d’améliorer les effets non-spécifiques de l’exposition aux contraintes et aux nuisances professionnelles, en identifiant les salariés les plus susceptibles et en essayant de les aider à comprendre ce mécanisme, afin de mieux tolérer ces symptômes certes gênants, mais bénins.
Il ne s’agit pas du tout d’abandonner l’action à la source, à savoir l’élimination, la diminution ou la maîtrise des facteurs de risque professionnels, mais d’avoir une approche globale du sujet, de mettre tout en œuvre dans l’intérêt de la santé des salariés dont le médecin assure la surveillance médicale, ce qui rentre totalement dans les missions du médecin du travail.
L’effet inverse, l’effet placebo, est également présent en santé au travail et peut être mis au profit de la santé des travailleurs.
L’étude de Smith et Pollard sur 60.000 employés de la poste en Angleterre dans les années 1972-1977 a montré un bénéfice de la vaccination anti-grippale qui dépasse la simple protection contre le virus et qui pourrait s’expliquer par l’effet placebo de l’action de médecine préventive menée par l’employeur, avec un résultat coût-bénéfice largement favorable.
Cette étude démontre que les employeurs ont intérêt à mettre en place au bénéfice de leurs salariés des actions de promotion de la santé ou de protection contre les nuisances ou les contraintes professionnelles et en plus de bien communiquer là-dessus en utilisant ainsi l’effet placebo dans leur faveur et en limitant l’étendue de l’effet nocebo.
Page créée le 05/11/2011.