Devant l’image d’un médecin du travail dont la mission serait le contrôle autoritaire de l’aptitude pour le compte de l’employeur, il convient d’expliquer que ce n’est ni ce que préconise la législation actuelle, ni ce que les médecins du travail se doivent de faire, dans une vision moderne de la santé au travail.
Et voici cette vision moderne mise en avant par la Commission Internationale de la Santé au Travail dans le “Code international d’éthique pour les professionnels de la sante au travail »:
L’objectif de la pratique en santé au travail est de protéger et de promouvoir la santé des travailleurs, d’assurer le maintien à son meilleur niveau de leur capacité de travail et de leurs aptitudes, de contribuer à créer et à assurer un environnement de travail sain et sans danger pour tous, de promouvoir l’adaptation du travail aux possibilités des travailleurs en tenant compte de leur état de santé.
Il n’y a donc aucune place pour le contrôle de l’aptitude lors des consultations de médecine du travail. Le terme est donc inadapté et il est donc important de le sortir des textes réglementaires.
En attendant ce jour-là, il faut continuer à utiliser ce terme inadapté, mais avec un sens différent. Voici ma vision des sens et des nuances, dans laquelle l’inaptitude n’est pas le contraire de l’aptitude.
Précision : l’avis du médecin du travail se porte seulement sur l’aptitude ou l’inaptitude médicale, pas sur celle professionnelle.
Conclusion | Commentaires et base législative |
Apte au poste | Aptitude médicale : présence des capacités physiques et mentales nécessaires pour réaliser le travail Il existe un équilibre entre les sollicitations du travail et les capacités du salarié |
Adaptation du travail à l’homme (aménagement du poste de travail) |
Si les sollicitations du travail sont supérieures aux capacités physiques ou mentales, le travail doit être modifié de manière à ce qu’il corresponde à ces capacités. L’autre situation est celle ou des mesures techniques ou organisationnelles doivent être prises pour améliorer les conditions de travail, éliminer ou diminuer les risques pour la sécurité ou la santé des salariés. Article L4624-1 du Code du travail : « Le médecin du travail est habilité à proposer des mesures individuelles telles que mutations ou transformations de postes, justifiées par des considérations relatives notamment à l’âge, à la résistance physique ou à l’état de santé physique et mentale des travailleurs. » Article R4623-1 du Code du travail : « Le médecin du travail est le conseiller de l’employeur, des travailleurs, […] en ce qui concerne […] l’adaptation des postes, des techniques et des rythmes de travail à la physiologie humaine. » La recherche de la nécessité et des possibilités d’adaptation du travail à la personne est particulièrement importante à l’occasion de la visite médicale d’embauche et de la visite de reprise après maladie (articles R4624-11 et R4624-22 du Code du travail) |
Inaptitude au poste : – temporaire ou définitive – partielle ou totaleInapte partiellement au poste de travail = Apte au poste avec des restrictions |
Idéalement l’avis d’inaptitude est subordonné à un intérêt évident de santé ou de sécurité de la personne concernée (ou des tiers) – Article R4623-15 du Code du Travail : « Le médecin du travail agit dans l’intérêt exclusif de la santé et de la sécurité des salariés dont il assure la surveillance médicale. »
En pratique, les avis d’inaptitude ont l’objectif d’extraire le salarié d’une situation susceptible d’altérer son état de santé ou d’aggraver une maladie pré-existante. Dans tous les cas, comme il s’agit d’un acte médical, le consentement éclairé du salarié doit être recherché, après la transmission d’une information adaptée à la personne, sur les risques et les avantages. |
Action de prévention | Commentaires et base législative |
Délivrance de conseils à l’employeur ou aux salariés sur les moyens de prévention primaire des risques liés aux contraintes du travail, à l’exposition à des nuisances particulières ou encore des risques d’accident. | La visite médicale représente l’occasion d’échanger avec chaque salarié individuellement sur ses conditions de travail, les risques professionnels, les mesures de protection, d’évaluer ses connaissances sur les risques et ses pratiques de sécurité et de le sensibiliser à certains risques ou moyens de prévention de ces risques. Ces entretiens médico-professionnels ont cependant une efficacité limitée, en absence d’un suivi sur le terrain et en raison du temps limité des visites médicales.
Article R4623-1 du Code du travail : « Le médecin du travail est le conseiller de l’employeur, des travailleurs, […] en ce qui concerne notamment : […] |
Recherche des prédispositions ou maladies représentant un risque supplémentaire par rapport aux risques professionnels pour la santé ou la sécurité de la personne concernée ou des tiers, dans un objectif de mise en place des mesures appropriées de prévention primaire. | Article R4624-25 du Code du travail : « Le médecin du travail peut prescrire les examens complémentaires nécessaires notamment au dépistage des affections comportant une contre-indication à ce poste de travail […] ou au dépistage des maladies dangereuses pour l’entourage » |
Diagnostic des maladies professionnelles ou à caractère professionnel, dans un objectif de prévention secondaire ou tertiaire | Article R4624-25 du Code du travail : « Le médecin du travail peut prescrire les examens complémentaires nécessaires […] au dépistage des maladies à caractère professionnel prévues à l’article L. 461-6 du code de la sécurité sociale et des maladies professionnelles non concernées par les dispositions réglementaires prises en application du 3° de l’article L. 4111-6 » |
Page créée le 06/06/2011.